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Méditerranée: L’économie bleue comme avenir

La transition vers de nouveaux modèles de production ou de création de valeur est souvent plus facile à dire qu’à faire, car il faut câbler le système que nous connaissons. Tout d’abord, changer le statu quo, la sensibilisation, la volonté politique et l’adhésion doivent être recueillis          au sein du gouvernement et de la société civile.

«Plan Bleu», un des centres d’activités régionales du Plan d’Action pour la Méditerranée (PAM) du Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue), vient d’élaborer en 2017 une étude sur l’économie bleue en Méditerranée. Baptisée «Une économie bleue pour une Méditerranée en bonne santé – Mesurer, surveiller et promouvoir une économie écologiquement durable en région Méditerranée », cette étude vise à identifier des indicateurs, à choisir des outils et à recommander des politiques publiques permettant de favoriser une « économie bleue » écologiquement durable dans la région méditerranéenne.

Nouvelle frontière

L’économie bleue est une économie non-polluante, circulaire et efficace dans l’utilisation des ressources, reposant sur des pratiques de consommation et de production durables, qui favorise le bien-être humain et l’égalité sociale et qui crée de la valeur économique et de l’emploi, tout en réduisant de manière significative les risques pour l’environnement et les pénuries de ressources. L’économie bleue permet de préserver la santé des écosystèmes marins et côtiers de la Méditerranée, tout en assurant un approvisionnement continu en biens et en services pour les générations présentes et futures. Beaucoup d’activités économiques sont basées sur l’économie bleue, à savoir le tourisme, les activités récréatives, la pêche et l’aquaculture, les énergies offshore, le transport maritime et ses infrastructures portuaires, l’exploitation minière du fond des mers… Ces secteurs se développent plus ou moins vite, avec plus ou moins de création d’emplois, mais ils doivent le faire dans un sens durable et inclusif.

Il s’agit d’une nouvelle frontière, un eldorado au niveau mondial. La Méditerranée attire déjà 30% des arrivées mondiales de touristes, soit 400 millions de passagers par an. Elle est déjà le support de 30% du transport maritime de fret mondial. Ce développement économique doit être accompagné pour qu’il soit durable et inclusif. Ces évolutions économiques ne sont pas sans menace pour les ressources marines et les éco-systèmes marins. C’est pour cela que Plan Bleu a créé un ensemble d’indicateurs disponibles et envisage une «pouponnière» d’indicateurs à développer.

Zoom sur quelques secteurs clés

Pour comprendre mieux l’importance de cette économie, l’étude a décrit les tendances globales dans chaque secteur. Pour la pêche, les données confirment que la Méditerranée est dans un état de crise écologique, après plusieurs décennies de surpêche. C’est donc toute l’économie de la pêche et la protection sociale qu’elle apporte qui sont menacées. La régénération de l’écosystème méditerranéen doit être une priorité pour toute la région, pour garantir la survie des artisans pêcheurs et des générations futures. Une gestion adaptée passe par la réduction des prises accessoires, l’adoption de quotas de pêche reflétant les besoins de long terme de l’écosystème et le respect des cycles reproductifs des stocks halieutiques.

Pour parvenir à construire une économie bleue efficace dans la région de la Méditerranée, il va falloir promouvoir une exploitation durable de la biodiversité et garantir la sécurité alimentaire. Cela doit se traduire par l’adoption d’une approche de gestion écosystémique qui protège la pêche artisanale tout en permettant aux stocks halieutiques de se régénérer. Pour être optimal, le plan de gestion de la pêche en Méditerranée doit reposer sur les avis d’experts scientifiques, favoriser une utilisation réduite des ressources énergétiques et supprimer les subventions aux pratiques de pêche non-soutenables.

La croissance du secteur de l’aquaculture présente un risque supplémentaire pour l’écosystème méditerranéen (rejets de produits pharmaceutiques et de polluants, impact sur la biodiversité locale, pression sur les populations de poissons sauvages…). Le développement d’une économie bleue doit ainsi passer par un examen critique de l’aquaculture, et garantir que les exploitations ne sont autorisées que si elles adhèrent à des normes environnementales strictes.

Pour le tourisme, la croissance future de ce secteur conduira à une aggravation des pressions environnementales déjà critiques qu’exerce le tourisme sur les écosystèmes côtiers et marins, tout en épuisant davantage encore les ressources locales. Il est donc nécessaire en Méditerranée d’évoluer vers un tourisme durable qui réduit son niveau de consommation et travaille à la protection et à la régénération des environnements côtiers et marins, tout en respectant les cultures et les structures sociales locales.

Pour permettre de mesurer cette évolution du tourisme, il est nécessaire d’obtenir des données supplémentaires sur la durabilité écologique du secteur (consommation d’eau et d’énergie, occupation des sols, production de déchets, etc.). Les données sur la contribution au PIB et à l’emploi confirment clairement le rôle central du secteur dans l’économie régionale (environ 10% du PIB total en moyenne). L’évolution du secteur dans la région indique que la réduction de l’impact écologique du tourisme côtier doit devenir une priorité, comme le souligne la stratégie «Croissance bleue» de l’UE. La situation actuelle montre que les pays de l’Est et du Sud de la Méditerranée sont ceux qui présentent le plus fort potentiel de croissance. Pour une évaluation optimale du secteur, un meilleur accès aux données concernant la durabilité écologique du tourisme apparaît essentielle, comme par exemple des données sur la qualité des plages ou sur le nombre de places d’hébergement touristique disposant d’un éco-label.

En ce qui concerne les navires, étant donné qu’il n’existe pas encore d’alternatives de transport à faibles émissions de carbone, ce secteur doit faire de la réduction des émissions, de l’efficacité des moteurs, et de la réduction des nuisances sonores sous-marines une priorité, tout en réglant les problèmes liés au recyclage des navires et aux eaux de ballast. Au niveau de la planification de l’espace maritime, la protection des mammifères marins et une bonne répartition géographique de tortues doit être assurée, en évitant les transports dans les zones à risque. Des pratiques portuaires durables doivent, donc, être développées, en mettant l’action sur la pollution, les émissions de gaz à effet de serre, l’efficacité de l’utilisation de l’eau et le traitement des eaux usées.

Quelles recommandations ?

L’étude émet des recommandations pour la mise en place d’une économie bleue prospère dans la région méditerranéenne. D’après les conclusions de l’évaluation, les politiques nationales et régionales permettant de promouvoir les pratiques de l’économie bleue en Méditerranée doivent être mises en avant. Par ailleurs, dans le choix des politiques nationales et régionales, il est nécessaire de prendre en compte les besoins en termes de politiques, et/ou le travail en cours dans la région dans le cadre d’autres processus de gouvernance, afin de créer des synergies. En particulier, il serait pertinent de prendre en compte le Protocole GIZC, la SMDD 2016-2025, le Plan d’Action CPD, l’initiative EcAp et tout autre mécanisme de gouvernance existant à l’échelle régionale, et susceptible de consolider l’économie bleue en Méditerranée (ex : le plan d’action régional sur les déchets marins).

D’une manière générale, l’étude indique qu’il faut renforcer la coopération régionale entre les différents organismes à caractère international pour qu’ils travaillent pour la Méditerranée. Il faut mieux mettre en œuvre les engagements internationaux et donc pour les pays, signer, ratifier et traduire dans la réalité ces engagements.

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